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mardi, 09 septembre 2008
Chronique d’une expo controversée
Après quelques 15 jours de fermeture estivale pour notre cinéma préféré, nombre de cinéphiles bayonnais attendions impatiemment la réouverture de l’Atalante en ce jeudi 13 août… Mais quelle ne fut pas la surprise pour certains en découvrant l’accrochage d’une exposition de photographies transformant les murs de notre chère taverne en le hall d’accueil d’une peña taurine. Je fus de ceux-ci et ne pus que protester sur le champ mais très courtoisement auprès de Michel Danjean, l’exposant, et Lucette Campagne, la responsable de la commission expo de l’association Cinéma & Cultures, tous deux encore présents sur les lieux. Il n’est probablement pas inutile de préciser que nous nous trouvions alors en pleine saison pour les aficionados de Bayonne ou d’ailleurs et que ce décors que l’on nous imposait ainsi ne pouvait être interprété autrement que comme une propagande en faveur du remplissage des arènes qui, juste- ment, cette année battent tous les records de déficit. Et moi qui croyais que l’Atalante pouvait être un espace « préservé » ! Comment dire, oui, je me suis senti carrément agressé dans mon havre de civilisation, en plein cœur de mon exception culturelle ! Bref, le soir même, je rédigeais un courriel des plus respectueux, mais néanmoins revendicatif à l’adresse de mon président, Jean-Pierre St Picq. J’aurais dû m’en douter, les vacances des enseignants ne coïncident pas très précisément avec la rentrée cinématographique et je patientais donc une semaine avant de lire sa réponse toute aussi amicale que sibylline qui m’invitait toutefois et intrinsèquement à assister à la prochaine réunion du Conseil d’Administration de notre asso- ciation où Jean-Pierre m’encourageait des plus explicitement à exprimer publiquement ma réprobation face à une assemblée très majoritairement acquise par avance à mes arguments anti- corrida.
Près de deux semaines après le début de cette triste affaire, nous étions une petite douzaine à nous être plus ou moins concertés, adhérents ou sympathisants de l’association Cinéma & Cultures, clients et habitués de la taverne, anti-corrida de toujours comme de fraîche date, rejoints par 3 ou 4 membres de la FLAC (Fédération des Luttes pour l’Abolition des Corridas) dont le président de FLAC-Aquitania, Jean-Claude Laborde. Nulle banderole, nulle distribution de tracts vengeurs, nulle interpellation des spectateurs entrant ou sortant de la salle de cinéma ce soir-là, juste quelques petits tableaux installés sous ceux de l’exposition controversée et la volonté affichée de participer à une discussion constructive. Pour les adhérents et sympathisants présents, le décrochage de l’exposition tauroma- chique apparaissait comme la réponse la plus raisonnable afin de rétablir la sérénité en ce lieu, à quelques jours d’une soirée cinéphilique importante et alors que débutait la campagne des adhésions pour notre association. Quelques jours avant, nous avions appris que monsieur Danjean pouvait proposer deux expositions de substitution toutes deux porteuses de quiétude et de consensus… Cela nous semblait la seule solution réellement pacifique plutôt que d’envisager une contre exposition en ré- ponse à ce que, de plus en plus nombreux, nous étions à con- sidérer comme une provocation des tauromaniaques. D’ailleurs, quelle contre exposition pouvions-nous présenter dans l’immé- diat puisque l’anti-thèse n’aurait su évidemment être séparée de la thèse apologique ? Après quelque deux heures d’échange de vues, d’argumentations et de contre argumentations ou chacun a pu débattre sans agressivité ni énervement (exception faite du tout aussi soudain qu’inexplicable pétage de plomb de Jean-Pierre St Picq à qui il a fallu demander par deux fois de baisser le ton parce qu’il y avait une séance de cinéma en cours), la controverse était déclarée close par le président alors que le Conseil d’Administration concluait cette vaine discussion par un double vote :
-- Un premier vote à l’unanimité des 13 administrateurs pré- sents pour refuser le décrochage de l’exposition en cours.
-- Un deuxième vote à l’unanimité moins la voix du seul pro corrida déclaré pour accorder à la FLAC l’autorisation d’accro- cher une contre exposition… sans toutefois préciser ni date ni modalité.
Nous quittions donc l’Atalante, ce soir du 26 août, un peu désabusés mais néanmoins décidés à rendre publique notre refus de voir transformé en peña taurine, ne serait-ce que le temps d’une exposition, notre cinéma préféré. La commu- nication du C.A. qui sera affichée le lendemain à la taverne nous apprendra qu’outre les deux votes, un « moratoire » au sujet de la corrida prendrait effet au 9 septembre 2008, date officielle du décrochage de l’exposition de monsieur Danjean, l’association s’engageant à ne plus exprimer ou afficher quoi que ce soit sur ce thème qui fait polémique. Nous ne voulions évidemment pas la « guerre » avec le Conseil d’Administration de notre association, nous ne nous sentions nullement tel le taureau face à la muleta du matador, nous voulions juste tenter autre chose pour convaincre, alerter encore afin de préserver ce lieu qui nous est si cher. Un communiqué dans la presse, peut-être deux, et puis surtout relancer la discussion, trouver de nouveaux arguments, insister sur le fait qu’une telle exposition donnait une bien mauvaise image à notre cinéma, que nous ne voulions surtout pas être traités en censeurs, et encore moins en aficionados, qu’il n’y avait aucune honte à reconnaître ses erreurs… Et puis, deux jours plus tard, Jean-Pierre demandait à me voir. Il craint que les anti-corrida se manifestent lors de la soirée avant-première du film Rumba et me propose de faire décrocher l’expo controversée juste le temps d’une petite fête entre cinéphiles… si je lui assure qu’après on n’en parlera plus, que les opposants cesseront de s’opposer, que les anti-corrida sortiront de l’arène et que les poules auront des cornes. Moi je me sentais prêt à lui promettre tout ce qu’il voudrait si, de son côté, il consentait un effort supplémentaire en me jurant qu’il ne raccrocherait pas de tout le week-end. On tope-là, parole d’homme, range ton portefeuilles c’est la mienne, et l’expo est décrochée sine die. Pour la plus grande satisfaction, évidemment, de tous les amis de l’Atalante qui nous étions mobilisés et que j’informais au plus vite de la bonne nouvelle.
Un peu plus de deux semaines après le commencement de cette regrettable affaire, nous pouvions estimer que se jouait son épilogue en ce joli vendredi 29 août. Nous pouvions raisonnablement espérer que la commission expo de l’association ne réitérerait pas sa provocation en raccrochant les tableaux de la propagande tauromachique. Candides que nous étions ! Nous n’avions pas compté avec la susceptibilité de nos administrateurs qui, ostensiblement indifférents à l’esprit festif de cette soirée, ne décoléraient pas de voir notre président prendre sans eux une telle décision d’apaisement. Ainsi, dès le dimanche après-midi, ignorant sans doute tout de la parole que m’avait donnée Jean-Pierre, Christèle Laborde, directrice administrative de l’Atalante, ordonnait le raccrochage de l’expo controversée. Définitivement désillusionné face à ce nouveau défi, je décidais de soumettre un projet d’éditorial à mes amis de la rédaction d’Ekaitza (cf. n° 1140). Mais cela n’était évidemment plus suffisant comme réponse, les post-its que nous collions alors aux tableaux raccrochés ne pouvait contrebalancer l’ampleur de la provocation, dans une ambiance désormais délétère voulue par les administrateurs revanchards (certains agressant même la seule salariée-adhérente de l’association ayant exprimé sa solidarité avec nous), nous devions saisir la seule perche qui nous avait été tendue lors de la réunion du C.A. et organiser la contre exposition. Le mardi 2 septembre, un adhérent de Cinéma & Cultures partait pour Auch en compagnie de Jean-Claude Laborde. Cinq cent kilomètres aller-retour pour aller récupérer une exposition anti-corrida d’une grande qualité artistique pouvant être agréée par la commission expo pas toujours très tatillonne sur la question. La direction de l’Atalante était bien entendue prévenue de l’arrivée imminente de la nouvelle exposition par ses convoyeurs… et décidait de réagir en organisant un « comité d’accueil » musclé pour interdire l’accès du cinéma à la contre exposition. Je passe pudiquement sur le détail des odieuses injures proférées par Jean-Pierre St Picq et Victor Pachon à l’encontre de monsieur Laborde, comme les tentatives d’intimidation à l’adresse de l’adhérent engagé dans cette équipée. Ce sont là vraiment des méthodes indignes. La contre exposition n’aura donc pas lieu. Le vote du Conseil d’Administration de l’association Cinéma & Cultures de ce mardi 26 août 2008 est totalement caduc et désavoué puisqu’il y a eu décrochage de l’expo controversée… et raccrochage, puis interdiction de la contre exposition autorisée.
Depuis ce 2 septembre, tout semble rentré dans l’ordre à l’Atalante, l’exposition de photos tauromachiques continue de donner des allures de peña taurine à notre cinéma préféré. Elle sera définitivement décrochée et le « moratoire » devrait entrer en vigueur dès ce mardi 9 septembre. Mais l’affaire de l’exposition taurine controversée ne s’effacera pas des mémoires. Ce soir, des gens me font la gueule, d’autres me sourient. C’est la vie qui continue, comme au cinéma.
18:13 Publié dans Cinéma, Grave-patrie, Sport | Lien permanent | Commentaires (2)
Commentaires
bizous, mon pote bleu!
Écrit par : amba TILL | jeudi, 23 octobre 2008
atxik, Lagunak!
Écrit par : jenofa | vendredi, 24 octobre 2008
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