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Merci de nourrir les poissons en mon absence

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mardi, 06 septembre 2005

Misère et malheur préfèrent le noir

 

La colère aussi

 

Des dizaines de morts à Paris dans les incendies d’immeubles insalubres ou pour le moins vétustes, cette nuit du 29 au 30 août, et juste avant l’été aussi. Des centaines voire des milliers de victimes en Louisiane et à la Nouvelle Orléans, la nature se venge en inventant des catastrophes que seuls les hommes sa- vent fomenter. Des dizaines, des centaines de milliers de géno- cidés de la guerre économique sur tout un continent, la terre d’Afrique est noire. Noire, la même couleur que toutes ces victimes dont les corps se mettent à pourrir spontanément dans nos consciences, ces victimes d’une même et unique guerre mondialisée. Dans l’échelle dégringolante de victimisation, nos sociétés « occidentales » ont plus que jamais peur du noir. Être noir c’est toujours pire que tout. Le pire des malheurs, ici et maintenant plus qu’hier et dans l’œil du voisin, être noir signifie malheur, misère et mort. Les trois «M» de la haine. Et maintenant, comme toujours, dans nos boites à images toutes faites, dans nos boites à voix de son maître, dans nos boites à plus d’idées ronronne l’hypocrite compassion, cette compassion médiatique à grand spectacle formatée pour échanger des bons sentiments contre un aveu général d’impuissance. La machine continue à tourner, folle cette roue de l’infortune qui cherche et trouve ses coupables parmi les victimes.

L’«Innommable» est au premier rang, comme toujours, tous les spots sont pour lui, tous les micros lui sont tendus et il continue à distiller sa haine du noir : il faut raser les squatts, chartériser les mal-logés ou les délogés ; pour supprimer la misère et le malheur, chassons-les bien loin de chez nous, broyons les noirs, tous les noirs, les femmes et les enfants d’abord, et le bonheur, la confiance reviendront. La campagne électorale bât le beurre de l’argent et de toutes les peurs du noir, l’«In- nommable» se rendra sûrement au chevet de son mentor Jacot le Rictus, président de toutes les bananes par intérim, pour distraire sa cour flagorneuse, devant les caméras éblouies de tant d’humanité il mime un combat de boxe charentaise avec son ami de cent jours… et me reviennent en mémoire déjà ces mots de haine ordinaire, minables :

 

 

Déjà les boites se sont remises à jacasser. Les coupables, il faut des coupables, pas responsables mais coupables, les jeu- nes des banlieues sont les coupables. Le pire, le plus effrayant que nature, c’est qu’il s’agirait de filles, de jeunes filles, d’une simple dispute entre jeunes filles qui aboutit au nouveau drame. Mais ce n’est pas le même immeuble, on est plus à Paris là, ni au Val de Grace, on mélange les catastrophes dans le grand chaudron de l’information et le citoyen spectateur du premier étage fulmine contre les noirs, peu importe. On n’a pas précisé la couleur des jeunes filles, pour une fois, par pudeur (sont elles voilées ?), ou pour laisser un peu tourner sur son élan la roue folle de l’imaginaire populaire… ou alors parce qu’on n’a pas d’images à vomir on rajoute, sibyllin, qu’être français peut avoir des origines plurielles, et bleu, et blanc, et beurre, mais pas noires, ou alors loin, très loin, très exotique, très «y’a bon banania», et rassurez-vous, bonnes et moins bonnes gens, les coupables sont identifiés, l’«Innommable» saura bien les punir, nous en débarrasser.

Toutes les nuits les enfants ont peur

Je hais l’«Innommable». De plus en plus fort. Parce qu’il me fait de plus en plus peur. Il y a quelques semaines, par défi et par goût du «bon mot» j’avais affirmé, en tout petit comité, devant des amis, que mon destin, ou plutôt celui du plébéien bleu était de l’assassiner. Normalement, je ne suis pas quelqu’un qui croit à la destiné, mais j’aime le noir, la couleur noire, j’aime à dire que ma colère est noire et donc belle. Malheureusement je ne sais pas assassiner, faudrait peut-être que j’apprenne…

 

Le plébéien noir de colère

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