Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Merci de nourrir les poissons en mon absence

« Chronique débâillonnée n° 2 | Page d'accueil | Rendez-vous ce soir pour le... »

jeudi, 14 février 2008

Chronique débâillonnée n° 3

Julieta y Julio
 

Elle est née à Bayonne, le premier jour de ce mois d’août inoubliable, au temps où il faisait si bon abolir tous les privilèges, une année toute ronde qui sentait le sable chaud des plages, sous les pavés de la vieille ville. Une année d’insouciance glorieuse. Elle a fait ses premières fêtes dans un berceau, Juliette, poussée par son amatxi en goguette et toute sa bande de copines de la rue Poissonnerie qui se relayaient pour lui faire dévaler les ruelles en pente, en hommage à tous les marins du Potemkine de la terre. Ses premières fêtes de Bayonne, Juliette, elle les a passées en braillant sur l’air de l’International.

La fête c’est comme une seconde nature pour Juliette. Toujours joyeuse, toujours heureuse, elle ne pleure que de rire mais sans aucune modération. Toujours chantante et dansante au pied des Pyrénées… et pourtant, si longtemps, elle a prétendu ne pas être basque, ni gasconne d’ailleurs, quoique née bayonnaise. Elle aimera toujours se moquer des « Bascoïs » comme des « Gascouilles ». « On ne se moque bien que de ce qui nous fait vraiment peur » se plait-elle à provoquer Julio qui n’apprécie que très modérément cet humour ostracisant.

La première nature de Juliette, c’est l’amour. L’amour de la vie, de la liberté, de l’égalité, de la justice, l’amour de l’amour, l’amour pour Julio, quoi. Cet amour qui fait heureusement encore s’engager les amoureux de la vie dans des luttes contre la guerre et la mort. Aimer c’est se battre contre tous les enfermements, contre toutes les discriminations, contre toutes les lois d’exception, contre toutes les injustices, contre l’indifférence et la haine aussi. Juliette est une lutteuse de l’amour, une exubérante de l’altérophilie.


Il n’est pas né à Bayonne, parle beaucoup mieux l’espagnol que le français mais se prétend basque… alors qu’il est Vénézuelien de naissance et de nationalité, officiellement, tout du moins.  Le souvenir de ses vingt et quelques premières années dans le giron protecteur de la communauté des émigrés républicains à Caracas est bien sûr encore vivant mais tellement loin déjà… jusqu’à sa fuite après les événements dramatiques à l’université Simon Bolivar, quelques mois à peine avant la première élection tant espérée d’Hugo Chavez. En fait, le plus beau de l’histoire de sa patrie bolivarienne, Julen l’a vécu par procuration., depuis Bayonne où il dit avoir rejoint sa véritable patrie de cœur, le Pays basque et Julieta. Oui, Julen est un patriote basque, un abertzale, même si son amoureuse se plait à l’appeler « Julio, comme Julio Iglesias » devant ses copains politiques, juste pour le taquiner. Un Basque d’Amérique, comme on dit, Amerikanoa. Mais pas un Basque de droite pour autant. Son plus beau souvenir du Venezuela n’est d’ailleurs pas loin de ressembler à son plus beau rêve pour Euskal Herria et remonte au 24 octobre dernier, quand le socialisme a été intégré à la constitution vénézuelienne. Julen aussi est un amoureux des autres, un amoureux des fêtes de quartier, un amoureux des solidarités actives, des engagements gratuits, un amoureux des luttes sans fin mais avec toutes les finalités du possible, un communiste, quoi. Un communiste, et patriote basque par-dessus le marché. Pas facile de prétendre à une inscription sur les listes électorales de Bayonne avec un tel curriculum vitae ! 

C’est à l’automne dernier que j’ai fait la connaissance de Julio. Il arrosait l’instauration du Socialisme hier à Caracas et pour demain à Bayonne en compagnie de quelques camarades indépendantistes du Pays basque sud. Ils chantaient et dansaient si joyeusement au pied de ce comptoir pyrénéen que je n’ai pu m’empêcher de faire une halte à la Taverne, en sortant de mon cinéma préféré, l’Atalante. J’aime aussi chanter, beaucoup, fort et à plusieurs voix si affinités, mais sans danser. Et je me lie plutôt facilement un verre à la main. C’est ainsi que Julio est devenu mon ami, et moi le sien. Grâce à Mikel Laboa, au socialisme révolutionnaire et à une entremetteuse tavernière que j’appelle Mamour dans l’intimité.

Assez rapidement, mon ami-camarade s‘est mis à me prendre la tête pour que je l’aide à obtenir l’autorisation de voter aux élections municipales. Ça a duré plusieurs semaines durant lesquelles je me suis évertué à lui répéter sur tous les tons et dans toutes les langues que je connais l’impossibilité absolue pour un étranger extra communautaire de voter en France… comme partout ailleurs en Europe, je crois. Mais les arguments légaux sont bien incapables de persuader un communiste et encore moins un communiste basque, quand ils contredisent sa logique : je suis bien placé pour le savoir. Et la logique de Julio lui dicte que, vivant à Bayonne depuis bientôt dix ans, il est donc citoyen de Bayonne et au même titre électeur de Bayonne et, qui sait, peut-être même un jour élu au parlement de la commune libre de St Esprit. Bref, je lui ai causé de la campagne Votation Citoyenne relayée par Baiona Berria, il a tout de suite adhéré au comité de soutien faute de mieux et un peu pour me faire plaisir, quand même. Ça sert à ça aussi les amis. Je suis en campagne, je vous l’ai déjà dit, il me semble.

Cet après-midi, on a pris le café ensemble. Julio passe souvent à la maison quand il ne travaille pas. Comme avec Mamour, comme qui dirait, nos horaires sont complémentaires, il est tout le temps à peu près certain de se faire inviter à boire un coup chez nous. En fait, il était plutôt content de tomber sur moi. « Pettan, qu’il m’a demandé, la saint Valentine, c’est aussi obligatoire pour les amouroses à Baiona ? ». J’ai un peu hésité, avec Julio, nous n’avions jamais encore orienté nos confidences sur le terrain des sentiments amoureux. Quand je lui ai avoué que, oui, c’est obligatoire pour un amoureux de faire la preuve de son amour, le 14 février comme tous les autres jours de l’année, il a éclaté de rire. Un rire de soulagement m’a-t-il semblé. « Y’ai fait livrer des flors pour Julieta au local dé Baiona Berria, auyourd’hui elle donnait oune coup dé main pour les costoumes dé carnaval, tou sais »… Le café n’a pas réussi à me faire avaler la honte inavouable, même à un ami. Julio ne pouvait pas savoir que l’amour de ma vie participait également à la conception des costumes de joaldun depuis deux jours et serait très probablement présente au local lorsque le livreur de fleurs offrirait à Juliette la preuve exhibitionniste de l’amour de son Roméo, euh, non, de son Julio. Evidemment, je n’ai rien marqué de mon désappointement, j’ai juste applaudi des deux mains en le félicitant pour sa super bonne idée… Moi qui espérais que ma grippe me dispenserait de célébration officielle !

à suivre... 

Commentaires

Elle a bon dos la grippe, qui ne t'empêche pas d'écrire jusqu'à une heure du mat, et moi mes vases sont vides !

Écrit par : Muriel | vendredi, 15 février 2008

Cela s'appelle se faire rattraper par la patrouille des fleuristes ?

Écrit par : Prax | vendredi, 15 février 2008

Va vite falloir que j'aille chez le confiseur du coin pour savoir si il reste un peu de guimauve après les tartines utilisées ici. Je dis du coin, je pense national. Au moins. Oh là.

Je pense galaxie, j'avoue.

Écrit par : Marat | samedi, 16 février 2008

Si t'arrives à trouver de la guimauve dans la galaxie, surtout tu nous le dis Par contre je connais une boutique à Bayonne, désolée, c'est dans mon "coin", où l'on fait le meilleur chocolat du monde. Et quant aux gens qui pensent "national" en ce moment...

Écrit par : amoureuse bleue | samedi, 16 février 2008

Rarement vu des petits points peser si lourds. Les points de suspension sont toujours lourds, on le sait, surchargés qu'ils sont par les doses de malignité trop désirée mélangées à un réel manque d'intérêt véritable. Venant toujours par 3, un qui veut finir un qui veut finir un qui veut finir, ils n'arrivent finalement jamais à se mettre d'accord et laissent ce goût désagréable de ne jamais s'entendre, de ne rien comprendre mais d'absolument vouloir montrer le contraire.
J'ai beau ne pas les aimer quand il se suivent hypocritement comme ça, je dois bien dire que ça me fait un peu mal au coeur de les voir ici utilisés de la sorte, après ce "national" qui, du coup, me fait froid dans le dos.
D'autant plus que pas un, pas un, ne s'est retrouvé après l'épisode de la galaxie et que je trouve ça du coup parfaitement injuste même si plus charmant. Forcément. Forcément plus charmant.
Peut être pas autant qu'une amatxi poussant un berceau mais quand même.

Écrit par : Marat | samedi, 16 février 2008

Moi aussi j'ai reçu une magnifique bouquet de fleurs sur mon lieu de travail.
C'est super ! Tous mes collègues me regarder avec envie et admiration. Merci à mon amoureux.

Écrit par : Rose | samedi, 16 février 2008

Les commentaires sont fermés.