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vendredi, 01 juillet 2005
Plaisir décence à la station service
Virginie, tu vas
au ciné en bagnole ?
Une station service anonyme en Allemagne, la couleur jaune me dit quelque chose mais il n’y a pas de nom de marque sur les pompes… mais en fond, par contre, on distingue bien le sigle et la marque du pétrolier Shell sur le camion citerne qui passe, par hasard, c’est presque du subliminal, juste au moment où Fanny, l’héroïne des Yeux clairs, le très joli film de Jérôme Bonnell, est en train de faire le plein de sa voiture. Enfin, plutôt la voiture de son frère qu’elle a empruntée… mais cela n’a au- cune importance, je ne veux pas parler du film ni de cinéma pour l’heure mais de cette station service où est arrêtée Na- thalie Boutefeu. En général, dans les films, les réalisateurs montrent très ostensiblement l’habillage des stations services afin que le spectateur puisse identifier tout de suite la marque du pétrolier qui n’aura pas manqué, très certainement et en échange de ces quelques images diffusées sur grands écrans, de participer aux frais de production. C’est très distinctement et plusieurs fois que l’on aura l’occasion de lire le nom de la mar- que, sur la pompe, sur le pistolet ou à l’enseigne de la boutique où l’acteur sera censé s’acquitter de sa facture d’essence… dont on ignorera toujours le montant. Question à mille louis : dans quel film, français ou étranger, avez-vous pu lire le montant d’une livraison de carburant sur une pompe ?... Mince, je ne sais pas comment orthographier le ding-ding-ding du xylopho- ne, Word me le souligne tout en rouge. Bref, grâce à cette di- gression cinéphilique, j’en viens au sujet qui préoccupe le cito- yen consommateur que je suis, tout particulièrement en ce 1er juillet, date symbolique à laquelle, en France, on a coutume d’é- voquer les augmentations. Et pas seulement celle du Smic, mal- heureusement. Là je veux causer des augmentations specta- culaires des prix du gaz et du pétrole à la pompe. Bon, bien sûr, ces augmentations n’ont pas eu lieu du jour au lendemain, dans la nuit du 30 juin au 1er juillet. De toutes façons, la plupart des stations sont fermées de nuit ou dotées d’automates 24h/24h, donc personne pour changer les prix cette nuit-là… ou alors ce sont des robots qui font le sale boulot… je ne sais pas… peut-être après tout. L’an prochain, je me mettrai à l’affût aux abords de la station du Leclerc, avec des jumelles de vue nocturne et je saurai. Je saurai qui est responsable de ces foutues augmentations qui me poussent à aller faire mon plein en Espagne.
Enfin, là je simplifie un peu, bien entendu. Je sais parfaitement que là c’est un autre problème, que les augmentations affectent proportionnellement les carburants en France comme en Espa- gne, que ce qui fait la différence de prix ce n’est pas l’augmen- tation mais la disparité des taxes. Disparité qui a pris un tour quasiment exponentiel depuis Maastricht, étonnant, non ! Mais, bon, je digresse à nouveau, je ne veux pas causer de cette dis- parité-là aujourd’hui : rien de neuf sous le soleil de l’unification européenne à ce chapitre. C’est juste la notion d’augmentation du prix de l’essence qui m’intéresse. Il y a je ne sais plus com- bien d’années mais sûrement un bon paquet, je devais encore être gamin, génétiquement parlant je veux dire, ouais c’était aux alentours de 1973, le premier «grand choc pétrolier», déjà à l’é- poque, on avait commencé à parler de prix plafond de l’essence, de prix maxi au-delà duquel les consommateurs à deux ou qua- tre roues décideraient immanquablement d’arrêter de consom- mer, ou alors s’amputeraient de leurs roues pour laisser repous- ser leurs jambes. On voit tout de suite très bien le lien existen- tiel entre la société de consommation et celle de l’automobile, vous me l’accorderez. Donc, dans cet ancien temps-là, déjà, on parlait de l’essence à 10 francs le litre. En même temps ça fai- sait très peur et ça semblait tout à fait impossible, irréaliste, comme dans un film d’horreur. Donc, en même temps, on culti- vait la classique et efficace terreur populaire du «on va man- quer» et en même temps on se disait que ça ne pourrait pas arriver, ou alors pas tant que nous serions vivants. Et après, hein, c’est plus pour nous, hein, on s’en fout. Pas notre problème ! Bref, l’essence à 10 balles ça nous causait, mais pas si clairement que ça finalement. Par rapport à notre pouvoir d’achat de l’époque, ça faisait vraiment trop. Trop peur et sûrement pas assez, quoique… Faudra un de ces quatre que je donne mon avis sur l’arme de la peur, l’arme de destruction massive des neurones absolue, mouais, un de ces quatre, j’en causerai… Quand le SP 95 sera à 1,50 euros à la pompe, c'est-à-dire approximativement les 10 balles fatidiques. Et c’est manifestement pour très bientôt si l’on en croit Virginie qui écrit sur le forum Le bar de la Côte (en un style copié-collé des plus alarmistes et militants à la fois). Bon, pour le très bientôt, là, Virginie, je veux bien te croire, quoique, c’est pas encore sûr, les Européens pourraient bien décider de recycler à leur compte l’idée jospinienne de la taxe flottante afin de réguler en même temps les cours du marché et la fameuse disparité dont je causais ci-dessus. Ils pourraient… si ils y voyaient un quelconque intérêt pour les compagnies pétrolières. Mais là, désolé, je ne vois pas.
Les Exxon-Mobil, BP et autres Total ou Shell se repaissent habituellement plus goulûment de la plus entièrement sauvage «libre concurrence». Ils se repaissent aussi bien des terreurs populaires du «on va manquer» que des optimistes inconscients du «on trouvera bien toujours une solution, faisons confiance au progrès et à la science». D’ailleurs ne sont-ce pas ces Maîtres du pétrole qui ont inventé l’ «horreur économique» ? Et n’est-ce pas Virginie qui se met à leur service en nous prenant pour des gogos ? Franchement, si je ne craignais pas que les pièges les plus grossiers soient souvent les plus efficaces, je me marrerais. Le «plan génial» pour lutter contre l’essence à 10 balles qu’elle nous propose n’exige pas le moindre effort de la part du citoyen consommateur de la Côte basque. Son truc à Virginie, c’est hyper simple (je n’ai pas dit simpliste, hein) : faire confiance aux marchés, les mécanismes régulateurs du marché sauront faire baisser les prix si, de Bayonne à Hendaye, nous décidons de boycotter les stations Esso et Shell. Ainsi, les deux plus grandes compagnies pétrolières au monde (Esso étant une filiale de Exxon-Mobil), avant de sombrer définitivement dans la faillite par la faute de nos réservoirs conséquemment remplis chez des concurrents (heu, disons Total par exemple), oui, les dirigeants de Shell et Exxon se concerteront immanquablement pour déci- der de baisser leurs marges et donc leurs prix à la pompe afin de nous reconquérir, nous, clients responsables qu’ils avaient un moment négligé de satisfaire pleinement. Merci Virginie de nous démonter une fois de plus combien nous pouvons vivre heureux dans cette société de consommation dont les consommateurs sont et demeureront à jamais les seuls Maîtres incontestables et incontestés. Bon, hum, à part que le message-chaîne que tu relaies ainsi du le forum de Cotebasque.net, ce n’est pas autre chose que de la pub indirecte pour Total ou BP. Rien d’autre. Aucun espoir de ce côté-là, malheureusement serais-je tenté d’ajouter (mais je résiste car je suis un citoyen conscient et mi- litant de l’écologie-sociale de père en fils). Le pire, Virginie, c’est que les plus grandes compagnies pétrolières au moooooonde ont déjà été moult fois dans le «rouge» et ce bien avant que n’ait débuté la campagne de boycott à laquelle tu participes avec tant d’allégresse. Et ça ne change rien aux cours du pétrole ni au prix à la pompe. Ça serait même très précisément le contraire. Quel- le engeance ! Vraiment on ne peut plus se fier à rien ! La régula- tion automatique des marchés, peau de balle on aura l’indécence à 10 balles. Vraiment, Virginie, je suis désolé de te dire ça aussi crûment, pour économiser sur notre facture d’essence seule la décence de l’économe sera efficiente : consommer moins, de moins en moins, et de moins en moins encore, car tout natu- rellement, un jour, du pétrole, il n’y en aura plus. Un jour. Bon, ça ne sera peut-être pas déjà pour le 1er juillet de l’an prochain. Sûrement pas, même. Je pense, j’espère… En attendant, sans t’affoler, mémère, prends plutôt ton vélo pour aller au cinoche… moi j’y vais à pieds, mais j’ai beaucoup de chance !
Le plébéien bleu pétrole
11:40 Publié dans digression | Lien permanent | Commentaires (0)
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