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Merci de nourrir les poissons en mon absence

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vendredi, 28 octobre 2005

Lettre à Pimentalai et à Arduraduna

 

Vive le piment !

 

Vive le Pays basque !

 

Et vive Monsieur le Maire !

 

Dimanche ce sera Aministiaren Eguna (Jour de l'Amnistie) à Makea. Des Basques, des abertzale (patriotes basques) y feront la fête et revendiqueront aussi. On n’y revendiquera plus l’am- nistie pour les prisonniers politiques basques, bien sûr, mais la libération conditionnelle pour Filipe Bidart. Les temps ont chan- gé mais certains mots, certaines idées demeurent, semble-t-il encore, et heureusement, comme inaltérables. Très chers Pi- mentalai et Arduraduna, je ne pense pas vous y rencontrer. D’ailleurs, vous y croiserais-je que je ne vous reconnaîtrais pas rapport à l’anonymat par lequel vous vous «protégez» sur la blogosphère. Par contre, je suis convaincu que pour le moins vos pensées et vos préoccupations ne seront éloignées des miennes que de quelques kilomètres ce jour-là. J’ai lu avec attention vos dernières notes sur vos blogs respectifs et comme le sujet me passionne aussi, j’ai bien envie de vous répondre sur la question, comme aurait dit Monsieur Hontas.

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Ben moi je ne me marre pas du tout. Le cynisme ne donnera jamais une réponse satisfaisante à qui veut réellement cons- truire. Puisqu'il s'agit de construire le Pays basque de demain, si je ne m'abuse, non ? Ma position concernant le département basque est connue depuis fort longtemps (en tant que Xan An- salas qui ne se sert d’un pseudo que par commodité littéraire), en fait, je n’en ai jamais changé : et si un jour on m’invite à voter, euh, je déclinerai l’invitation. J’essaie généralement de demeurer courtois. Du moins sur la forme. Quant au fond, j’ai toujours estimé que cette revendication départementaliste, et je l’ai répété très récemment sur mon si joli blog tout bleu, outre qu’elle ne saurait jamais s’avérer autre chose qu’une impasse (et là je ne veux aucunement parier sur l’avenir en prétendant que jamais un tel découpage départemental ne serait appliqué –les Français ont bien «concédé» une communauté de commu- nes à la basquitude--), cette revendication, donc, ne s’inscrit pas dans une stratégie de construction nationale. Vouloir rem- placer un découpage départemental par un autre ce n’est rien d’autre qu’un simple détricotage-retricotage de la cotte de mail- les centralisatrice de l’état français. Sur une base argumentaire inverse de la tienne, je pourrais aussi, par facilité intellectuelle, me laisser aller au cynisme en soulignant qu’il est regrettable de souffrir ce mépris des tenants du pouvoir politique pour une expression tout ce qu’il y a de plus minimaliste (et je ne songe pas là seulement au département) plutôt que sur le fond d’une véritable revendication identitaire telle que, euh, disons l’auto- nomie, par exemple. Mais on m’accuserait encore d’exhiber éhontément mes amertumes et autres nombreuses frustrations alors que, sincèrement, je ne cherche qu’à comprendre ce qui nous arrive, nous abertzale d’Iparralde qui, fut un temps, nous disions tous (ou presque) et uniformément socialistes. Com- ment en sommes-nous venus à exprimer notre radicalité en décalage constant et exponentiel entre les mots et les actes ? Fut un temps où nous n’étions que quelques dizaines de plus ou moins marginaux à crier Independentzia et Sozialismoa dans les rues du Petit Bayonne ou à lancer des cocktails molotov contre les CRS pour libérer le peuple basque en nous clamant révolutionnaires. Mais ils étaient encore moins nombreux à l’époque pour s’acharner à amarrer le frêle esquif du natio- nalisme basque au Nord à un serpent de mer vieux de deux siècles… et ce, au nom du pragmatisme. Ils étaient moins nom- breux que nous, mais socialement beaucoup mieux installés, beaucoup plus bourgeoisement assis. La logique infernale action-répression-action, dans laquelle, nous les radicaux, nous sommes irrémédiablement enfermés, aura plus gravement encore sapé les idées que les volontés militantes. En face d’une répression que nous pensions censée dévoiler le vrai visage du monstre oppresseur, nous avons appris à nos dépens que les victimes n’attirent qu’un temps la compassion des opinions pu- bliques. Et encore aurait-il fallu que ces opinions soient infor- mées et puissent d’une certaine façon s’identifier aux victimes que nous étions ! Ce qui ne fut que très minoritairement le cas… Alors, de grands stratèges révolutionnaires ont estimé que les mots de notre révolte tout comme ceux de nos réels espoirs devaient se tempérer du culte de l’innocence afin de mieux camper notre statut de victimes. Nous devions devenir de gentilles brebis face aux méchants loups et ainsi l’existence avérée des prédateurs-oppresseurs justifierait que certaines brebis s’éloignassent quelque temps du troupeau pacifiste pour défendre la «maison du père». Nous avons appris à cultiver la dichotomie révolutionnaire entre la résistance déclinée sur un mode toujours plus humaniste voire «victimaliste» et l’expres- sion de notre radicalité au travers d’actions de moins en moins compréhensibles sur le front «militaire». Évidemment, au Nord, nous avons essentiellement subi cette stratégie de fuite en avant militariste car nous n’avons jamais concrètement eu entre les mains les leviers d’un véritable front de lutte spécifique à Iparralde. Ainsi nous nous sommes peu à peu noyés dans nos propres larmes d’impuissance et ceux qui ont surnagé, les socialement mieux intégrés, les pragmatiques, les A + B = 2 départements au lieu d’un, ils ont saisi l’opportunité de décider majoritairement qu’était venu enfin le temps de revenir en arrière, de faire table rase du futur pour les idées abertzale. Et là, aujourd’hui, ils auraient enfermé les clés de cet avenir hypothétique au fond d’une urne qui devra s’ouvrir dimanche prochain à Ezpeleta. Selon que les Maires du Pays basque nord estimeront qu’un référendum est nécessaire ou non, les abertzale pourrions ou non réhabiliter la «désobé- issance civile». Je suis désolé, camarades, mais, à l’envers cette fois, vous ne faites que reproduire cette même dichotomie qui ne saura que nous marginaliser en édulcorant toujours davantage notre basquitude. Comment pouvez-vous être à ce point oublieux des impasses et des fuites en avant de notre histoire récente ? Si les Maires disent Non dimanche, que fait-on ? (je crains que ce cas de figure n’ait pas été sérieusement envisagé) On envoie nos jeunes faire les Démos le jour et les Segi la nuit ? (ils se retrouveront bien un jour prochain, ensemble devant les tribunaux parisiens, pour tenter de défendre la revendication départementaliste criminalisée) Ou alors on reprend tout à zéro depuis le serment d’Itsasu contre celui du Jeu de paume ? Et si les Maires disent Oui, combien de temps et jusqu’à quel niveau de radicalité devrons-nous assumer de nous engager en mettant entre parenthèses nos véritables aspirations nationalistes ?...

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Oui, je sais, la radicalité ce peut et ce devrait être avant tout la lutte de masse. Vive l’utopie, bordel ! Hum ! Quel idiot je fais ! Mais non, les pragmatiques ne croient plus non plus à la lutte de masse mais au lobbying : mobiliser les élus, les décideurs politiques et économiques, les vedettes des médias, tous les VIP, c’est ça la real politik du tiroir caisse.

 

Le plébéien bleu

 

PS. Pour celles et ceux qui persistent à rêver d’une politique à hauteur des yeux et du cœur (c'est-à-dire dans les nuages) des hommes et des femmes de ce pays qui ont bien les pieds sur terre, je lance ici une invitation à partager notre optimisme viscéral en tentant d’offrir une alternative crédible aux fos- soyeurs pragmatiques. Je sens qu’on va peut-être me casser la gueule… sauf si je préviens qu’on risque de le faire q ;o)

Commentaires

BRAVO POUR CE BLOG PUR CELTE !!!

Écrit par : ANDREESEN | vendredi, 28 octobre 2005

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