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Merci de nourrir les poissons en mon absence

dimanche, 06 mai 2007

Trêve de comptoir

 
Français par défaut
 
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L’heure apéritive est parfois propice à la réflexion citoyenne, surtout a posteriori. Et encore davantage les jours d’élection présidentielle. Là, tout à l’heure, je suis allé voter, c’est qua- siment un aveu. Aveu d’inhibition, l’esprit pas vraiment purgé de cette rancœur démocratique que je ne parviens pas à expliquer (et encore moins à partager). Mon devoir bâclé, en passant devant Le Balto, je ne sais pas pourquoi, ce n’est pas, ce n’est plus depuis longtemps dans mes habitudes, j’ai eu envie d’entrer, de pousser cette porte vitrée, de franchir le Rubicon qui me sépare des rubiconds. Le pire étant accompli, je suis entru, je me suis assu au comptoir  et j’ai commandu, un demi. C’est ma tournée, qu’il a dit le type rougeaud derrière le distributeur de cacahuètes. Il y avait deux autres types avec lui, moins rougeauds mais plus âgés, peut-être. Ils arrosaient les élections certainement, que je me suis dit et que je leur ai demandé. Ben non, c’est ma fête, qu’il a répliqué l’empourpré définitif, esquissant un sourire. Alors j’ai esquissé aussi, ses copains ont franchement rigolé et on a trinqué à la santé de tous les Prudence, qui est un prénom masculin insuffisamment populaire de nos jours.

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dimanche, 08 avril 2007

Aberri Eguna 2007

 
 
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Mon premier Aberri Eguna, je l’ai célébré par surprise, disons. C’était en 1971, je pense, le jour de Pâques, évidemment. A St Jean de Luz. Je sortais de la grand-messe avec ma mère, lui tenant la main, bien sagement, comme un gentil petit garçon qui croit encore que le Monde est à sauver, quand soudain, la foule fit barrage entre mes rêveries rédemptionnelles et la pâtisserie Etchart, de l’autre côté de la rue Gambetta. Des femmes criaient, les bigotes fulminaient, des hommes scandaient, les bigots fustigeaient tandis que deux drapeaux se défiaient en un singulier duel au milieu de la fumée des lacrymogènes. A l’instar de mon estomac, mon cœur empli des seules bonnes et belles intentions pascales devait très certainement battre la chamade tandis que maman me broyait le métacarpe pour m’arracher à ce spectacle d’apocalypse nationaliste. Très certainement. Ma mémoire n’embellit rien, c’est à peine si je donne un peu de contraste à mes souvenirs d’enfant pour y découvrir les mots d’une genèse personnelle… Amatto ne pouvait décemment m’expliquer que des Basques se battaient contre des Français (c’était en fait plutôt le contraire, l’agresseur s’étant avéré être un ultra nationaliste français membre éminent du SAC, étendard sanglant levé à bouts de bras vengeurs, chargeant le groupe de patriotes basques afin d’abreuver les sillons sous les pavés à deux pas de la plage), tout en m’entraînant fermement vers le chemin salvateur de notre maison, elle prétendit, en guise de justification pour notre fuite (je n’aurais dû alors n’avoir aucune raison de douter de sa parole) que c’était des Espagnols (plus de 35 ans après, j’hésite encore à utiliser une majuscule) qui étaient venus tout exprès foutre la merde au Pays basque, en France, au Pays basque-français, quoi…

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vendredi, 08 décembre 2006

Bye bye Txori beltz*

 
 
Je vous salue Sylvie
 
 
 

 

Ça m’est revenu comme ça, du coq à l’âne, en jonglant avec des mots incongrus, dans ma tête. Hier. En arrivant à L’Atalante. Je n’avais pas encore lu la presse, ni vu les infos locales de FR3. Rien. A peine si j’étais obnubilé par l’évidence de ma défaite. Je serai le seul à lever le bras pour ce non si vain d’honneur, ce non au «principe de réalité», si vilement démocratique : lance ridicule brandie sous une «triste figure» au milieu  d’un champ d’unanime inertie souriante. Qu’y puis-je encore ? La messe est dite… l’inéluctable fatalité, implacable, inexorable… à quoi bon m’entêter ? Ramuntxo s’en va, Sylvie arrive… Agur Jauna ! Ave Maria ! Oups, lapsus, sourire, auto- dérision. Je vous salue Sylvie ! Sylvie de Hasparren au Pays basque, pas Marie la Juive palestinienne. Sylvie Larroque. Oui, honneur à l’impétrante, la nouvelle directrice artistique. Honni soit l’empêtré !

Et c’est quoi donc cette histoire de messe ? L’assemblée géné- rale ordinaire de l’association Cinéma & Cultures serait-elle une messe d’enterrement et la passion cinéphilique une veuve joyeuse ? Je suis en plein délire de tristesse…

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mardi, 15 août 2006

Mes vacances avec Marine Le Pen

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Pour fuir les

 

fêtes de Bayonne

 

 

Les vacances au mois d’août, enfin, au moins la première quinzaine, quand on est Bayonnais ou voisin de la capitale que les Basques du nord voudraient confisquer aux colporteurs de gasconnades, c’est généralement l’occasion pour jouir pleinement de ces fêtes que je me refuserai toujours à appeler « feria ». Généralement. Plus plébéiennement et carrément bleue, c’est pour moi l’opportunité de fuir ces journées et ces nuits de folie que d’aucuns n’hésitent pas à qualifier de liesse populaire. Je ne jouerai pas sur les mots. Cette année encore j’ai fui… et jusqu’à mon retour de vacances, je persistais à assumer plutôt crânement mon soi-disant boycott. Des raisons à invoquer pour justifier ma fuite (c’est tout de même le seul mot juste, alors je m’autorise la répétition), j’en ai évidemment tout un catalogue, plus ou moins politiques, plus ou moins économiques, très culturelles, mais essentiellement d’ordre caractériel, je dois le reconnaître, car je suis et demeure un caractériel, malgré mes efforts incessants pour contrôler les coups de sang derrière lesquels je dissimule toujours péniblement mon agoraphobie. Bref, comme cette année les augures de la commission municipale des fêtes annonçaient une énième augmentation exponentielle de la foule des festayres qui pourraient même dépasser le million… le million, le million, le million !... je n’ai pu en déduire qu’une fois encore, la fuite serait pour moi synonyme de survie. Donc, trois jours avant l’ouverture officielle, alors que les employés municipaux guantanamoïsaient tout ce que Bayonne compte d’espaces verts et de ronds-points fleuris, avec ma complice et dans sa grenouille roulante, nous prenions la grand-route du nord, là aussi à contresens du flux touristique généralisé, direction la Bretagne, plus précisément celle du Morbihan, pour une première étape au pays natal de Jean-Marie où le vert et le gris se mêlent sur terre comme dans le ciel… euh, sauf quand il fait beau et que nos pas croisent ceux de Marion Anne Perrine, fille benjamine du Jean-Marie sus évoqué, brisant net mon élan poétique et les traditions météorologiques…

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mardi, 29 novembre 2005

Les yeux dans l’ACID

et le vacarme dans les oreilles

 

 

Pas un seul,

 

mais les deux...

 

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Il y a des soirs comme ça où le ciel pourrait vous tomber sur la tête… Du moins, c’est ce que je m’imagine, parfois… Parfois, lorsque la grêle sample, sur le toit, un toujours inédit vacarme de l’enfer, comme samedi soir, au-dessus de mon si confortable fauteuil de cinéphile autoproclamé, au milieu du premier rang de la vénérable salle de l’Atalante, quartier St Esprit, à Bayon- ne. Dans l’obscurité, je n’ai pas encore pu voir que l’un des murs du cinéma pleure déjà sur toute la misère de notre monde de haine et de violence. Sur l’écran, un groupe de jeunes Juifs venus communier avec leur Histoire au sommet d’une monta- gne. Un haut plateau, plutôt. Nous sommes à Massada, les ruines d’une forteresse mythique où leurs ancêtres zélotes auraient tiré le sort par la queue pour donner un sens à leur suicide collectif. Les vingt siècles d’une histoire d’errances et de malédictions s’ébrouent encore de malheur, ici où la légende veut que des pères tuent leurs propres fils avant de se donner eux-mêmes la mort plutôt que de se rendre, plutôt que de vivre sous le joug de l’occupant. C’est l’aube et nous sommes dans la vraie vie. Vraie vie qui est du cinéma. Une aube frileuse et venteuse. Les enceintes de la sono me sifflent aux oreilles la fureur stéréophonique d’un vent du désert qu’aucun mur ne saurait faire taire ; vacarme intérieur en écho à la tempête qui déchire cette nuit cataclysmique sur la Côte basque. Nous sommes à Massada. Au bord de la mer Morte. En pleins ter- ritoires occupés. Au sommet de l’ironie. L’ironie qui n’est pas une montagne. L’ironie qui est la vie. Aussi. L’ironie qui est une des armes vivifiantes du cinéaste révolté : Avi Mograbi.

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J’ai fait sa connaissance dans l’après-midi, ce samedi après- midi, deuxième journée de Concentré d’ACID… C’est vrai qu’il a un air bonhomme, à l’écran tout du moins, qu’on le croirait presque sur parole quand il prétend avoir «appris à surmonter [sa] peur et à aimer Ariel Sharon». Quelle jubilation ! Avec lui j’ai chanté au karaoké final, défoulatoire, moi de dos lui de face. Face à un public, dans la salle comme dans le film, se comptant sur les doigts d’une seule main… Non, je n’oserai jamais réécrire sur fond bleu cette antienne contre nature que j’ai entonnée, sur un air de rock phylactérien, encore une heure après ces dernières images surréalistes d’un bien étrange docu- mentaire autofictionnel… en faisant mes courses au super- marché, je fredonnais à tue-tête, dans ma tête, ces deux mots liés en rythme de slogan inavouable... Ben si, j’ose : «Aupa Bibi ! Aupa Bibi !» (Vive Benjamin Netanyahu !). C’est honteux pour un gauchiste plébéien aussi notoire que moi, je sais. Mais moi, au moins, je ne l’ai pas fait devant une caméra de cinéma, et puis je ne le pensais pas, ou alors très exactement le contraire : «Aupa Avi ! Aupa Avi !». Bref, Avi, je l’ai vu, en vrai, pour la première fois, à la Taverne de l’Atalante, il devait être 20 heures et des broutilles apéritives à mon horloge interne. Je lui ai serré la main et j’en suis très fier. Un peu fort, façon viril et chaleureux, enthousiaste mais surtout pas feint, j’ai voulu par- tager mon humanité avec cet homme que je ne pouvais con- naître ni d’Adam ni d’éve car mes aïeux à moi sont des dino- saures et n’ont traduit la Bible en basque que très tardivement. Alors je lui ai dit «ongi etorri Euskal Herrian», comme ça, pas du tout biblique mais ostensiblement basque, avec ma langue de pierre, et Ramuntxo, toujours avenant, lui a traduit, en anglais, puis en français : «Bienvenue au Pays basque».

 

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En vrai, je l’ai trouvé beaucoup moins bonhomme mais telle- ment plus de chair, Avi. à vif, je l’ai trouvé, bien vif. Je lui ai dit que son film de l’après-midi m’avait foutu la banane et je l’en remerciai du plus expansivement que je sache, pensif. Il a souri tout aussi pensif et j’ai souri à mon tour quand il a affirmé qu’après avoir ri je pleurerai peut-être, ce soir, pas d’un seul mais des deux yeux… Maintenant, je ne suis plus très certain qu’il m’ait dit cela. Mais c’est ça que ça voulait dire, je crois, l’ironie n’est pas toujours le langage le plus intelligent. Pour les fois où j’aurais été tenté d’en douter, Monsieur Mograbi m’en aura convaincu, l’ironie parfois est tout simplement impossible. Voilà. Il me semble. Voilà ce qu’a voulu dire cet homme debout, cet Israélien libre et antisioniste, ce fabricant méticuleux de films plus interrogatifs que démonstratifs, ce grand cinéaste militant et cinglant dans la juste lignée humaniste d’un René Vautier, voilà l’avis éclairé d’Avi quand il ose suggérer une parenté philosophique entre les suicidaires Zélotes d’il y a près de deux mille ans et les Palestiniens désespérés d’aujourd’hui. La métaphore est tout aussi édifiante si l’on a accepté de faire avec lui un parallèle entre la vengeance biblique, hégémonique et suicidaire de Samson contre les Philistins (ancêtres des Palestiniens) et le destin d’un état israélien sioniste qui détient l’arme absolue, la bombe atomique. C’est juste ça qu’il a voulu nous montrer, Avi, sans ironie aucune. Ou alors très peu. Si peu que, moi aussi, un instant, j’ai bien cru entendre les cris belliqueux des Romains autour de la citadelle de Massada, tout comme, il y a un peu plus de douze siècles, avec mes compa- gnons, au sommet du col d’Orreaga (Roncevaux), je suis certain d’avoir poussé d’énormes rochers pour écraser l’arrière garde de l’armée impériale de Charlemagne et ainsi venger l’incendie et le pillage de la capitale des Basques (Pampelune). À l’époque, nous les Basques étions déjà identifiés aux Maures ; nous aurions pu très bien être amalgamés avec des terroristes islamistes, à l’époque, par exemple… Mais je m’égare.

 

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C'est à cause de
 
Monsieur Mograbi
 
 
Je ne suis plus trop sûr de rien. Comme d’habitude, d’ailleurs. Du film inoubliables, resteront, dans ma conscience, la surim- pression des images et des voix, des histoires et de l’Histoire, le courage extraordinaire de ce soldat de la sincérité brandissant sa caméra comme un résistant empoigne son fusil quand l’occu- pant interdit à des enfants d’aller à l’école. Resteront ces ima- ges furtives de l’actualité cathodique sur l’écran derrière Avi, et les voix des ces deux amis qui ne peuvent se rejoindre de part et d’autre du combiné téléphonique, et puis à la fin, en blanc sur l’écran devenu noir, ce générique en langue yiddish, ces formes hébraïques fascinantes et indéchiffrables pour moi qui ne sais lire que du côté gauche… mais pleure couramment des deux yeux quand un étranger s’adresse à moi dans ma langue, la langue des hommes de bonne volonté, j’espère. Resteront ces questions désormais devenues essentielles pour moi, ces questions du sens des mythes fondateurs des cultures humai- nes, ces mythes qui auraient pour fonction fondamentale de nous déposséder de notre droit de critique, de nous aliéner aux certitudes du temps, ces fondements qu’il semble aujourd’hui impossible de remettre en question fondamentalement.

À cause de vous, Monsieur Mograbi, quand la lumière s’est rallumée, ce samedi soir, à cause de votre film et de nos poings serrés, le mur de notre cinéma préféré a été inondé par toutes les larmes tombées du ciel de nos impuissances, l’impuissance torrentielle de toutes nos croyances, l’impuissance de nos my- thes et de nos certitudes mensongères. Alors vous avez souri de notre silence complice, Monsieur Mograbi. Vous avez souri à nos efforts pour éponger le mur. Vous avez souri car rien n’est fatal tant que l’humanité s’entête. Vous avez souri en basque parce que vous êtes poli et civilisé, Monsieur Mograbi. Jauna*. J’ai souri aussi, avec la moitié de la salle que vous avez su séduire et déranger, et je me suis dit qu’il faudra bien un jour remonter tous ces rochers au sommet de la montagne. Ça ne se fera pas tout seul. Ça c’est sûr. Être basque à Bayonne ce n’est pas encore être un Zélote à Massada, heureusement…

Monsieur Mograbi, certaines critiques prétendent que vous au- riez un air bonhomme, un visage rond, un gros nez… Et alors ? Moi aussi j’ai un gros nez !... et deux yeux que l’on ne me crèvera pas de sitôt.

 

Le plébéien bleu

 

*Jauna = Monsieur (prononcer "Dyaouna")

 

mercredi, 16 novembre 2005

La vraie vie c’est de la publicité

 

Le

 

cauchemar

 

tchèque

 

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Hier soir, aux alentours de 20h 15, l’heure du rendez-vous fixé par Ramuntxo pour ne pas assister au concert qui ne précéderait pas le film qu’il ne fallait surtout pas voir mais que nous n’au- rions manqué sous aucun prétexte (moi, Robinson Crusoé et son alter ego le plébéien bleu), je faisais donc mon entrée, tout à fait anonymement, dans le hall de la Taverne de l’Atalante à Bayon- ne, bien décidé à prendre au piège de mon APN rafistolé les quelques témoignages photographiques essentiels qui illustre- raient le reportage ethnologique sur la jeunesse locale et estu- diantine avec lequel j’entendais agrémenter mon si joli blog tout bleu. Les résultats ne sont jamais à la hauteur de nos attentes. Du moins je préfère m’en convaincre, ce soir, en écrivant ces lignes sans trop savoir où elles me mèneront ou si même je parviendrai à conclure avant vendredi… Voilà, j’y étais donc, l’index droit crispé sur le bouton déclencheur de cataclysme, flaaaaaaaaaaash, les lunettes au fond de mon «fuck in town», impossible de vérifier si la prise vue est bonne. J’ai forcément bougé, le cadrage est aléatoire, il fait sombre, la jeunesse a besoin d’obscurité pour s’épancher, semble-t-il, en face de moi c’est très certainement l’orchestre, les musiciens je veux dire, les Sunflowers qui ont super bien chauffé l’ambiance. Ça danse. Ça regarde danser. Ça fume. Ça se regarde fumer. Ça se bouscule poliment et ça sourit. Ça éclate de rire et de chaleur humaine, manifestement. Ça boit pas mal aussi. Plus qu’à l’habitude, c’est sûr, c’est ça les jeunes. Plus qu’à l’habitude à la Taverne de l’Atalante, je veux dire. Quoique… Enfin, je ne sais plus, c’est peut-être leur habitude aux jeunes, je ne sais pas, j’en ai pas, moi, de jeunes. Ça étudie le jour et ça fait la fête la nuit, les jeunes, ou vice versa, je crois. Sauf s’il y a le couvre feu, bien évidemment. Bref, ça paye ses consommations avec des tickets d’invitation bleu et blanc. Bien étrange façon de faire de la discrimination positive, non. Je ne dis rien pour les couleurs, mais, bon, moi ma bière je l’ai payée trois euros dix... ça bénéficie de plein de privilèges, les jeunes, du moins certains, ici, certains soirs. Et ça semble trouver ça tout à fait naturel. Faut leur offrir des coups, aux jeunes, sinon ils refusent de venir gratuitement au cinéma. C’est comme ça les jeunes, ici et maintenant. Et puis ça me dit que ça ne veut pas être sur la photo…
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Les ennuis vont peut-être déjà commencer ! Des fois j’ai beau- coup de chance, pas toujours, pas souvent en fait, des fois mê- me je me figure que c’est jamais, mais là c’est flagrant, j’ai eu de la chance. En fait, le cataclysme ce n’est pas moi qui l’ai dé- clenché avec mon index droit mais une fille pas si jeune que ça (on peut être étudiant à tout âge, n’est-ce pas !) en disant je ne sais quoi à je ne sais qui, une fille que je ne saurai pas recon- naître, pas davantage, malheureusement, que ce «je-ne-sais- qui» ; toujours est-il que la diversion a opéré et que j’ai réussi à me dissoudre dans la foule tandis que le jeune vindicatif, qui voulait probablement tirer un profit mousseux et subséquem- ment désaltérant de son droit à l’image, n’existe désormais plus que sous la forme de pixels, et de dos, sur cette page d’in- ternet. Ce cataclysme, c’est un tonitruant et incroyable fou rire masculin, un truc complètement dingue qui m’aura cette fois encore sauvé la mise et qui pour moi, si j’avais pu l’enregistrer, témoignerait au plus juste de l’esprit et de l’ambiance de cette soirée et du film qui en a fait le prétexte «faculturel» : Un rêve tchèque. Un brillant «documenteur», pour paraphraser le critique de Studio Magazine, dont je dirai peut-être quelques mots ici si vous n’allez pas le voir, sinon, les commentaires, autant que ce soit vous, très chers lecteurs, qui les fassiez. Moi je suis à la recherche de ce type, de ce cataclysme cinéphile qui aura su si bien ponctuer toutes les cinq minutes, au deuxième rang, deuxième fauteuil en partant de la gauche face à l’écran, ce spectateur extraordinaire de spontanéité qui aura provoqué des bangs en chaîne (140 décibels au ras des fauteuils pour un franchissement du mur du son à mille mètres d’altitude au-dessus de l’écran) pour célébrer joyeusement l’aveu cynique de ce cauchemar tchèque qui ressemble tant à notre quotidien. Bien sûr, je comprends bien la colère de Pantxika et les réserves de Maddi, mais je préférerais qu’elles en parlent elles-mêmes, ici. Si elles me lisent. Ce premier film de deux très jeunes réalisateurs tchèques qui pourrait désormais être qualifié de «culte» par nombre d’étudiants de la faculté de Bayonne, pour ma part, je ne suis pas convaincu qu’il puisse porter un message pédagogique bien au-delà d’une certaine jubilation à tourner en dérision le drame essentiel de nos sociétés d’avidité. Quand le rire s’éteint le désespoir point (proverbe collectiviste). Mais ne boudons jamais notre plaisir, disait Monsieur Hontas, et il avait bien raison. Bref, je veux re- trouver ce désormais illustre anonyme. Le rieur cataclysmique. Aidez-moi, très chers lecteurs de ce si joli blog tout bleu, aidez-moi à l’identifier. Je voudrais tant pouvoir enregistrer son rire et le greffer dans ma propre gorge. Je voudrais tant qu’il revienne tous les soirs à l’Atalante pour nous offrir des salles pleines comme un œuf qui volerait des poules après le bœuf, pleines d’un public chaleureux, chaud et heureux de communier sans confession, des salles pleines de jeunes qui aiment le bon cinéma et la bonne bière et connaissent leur vrai prix.

 

Vendredi du Soir (espoir)

 

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(photomontage réalisé par Maddi)

mardi, 06 septembre 2005

Comment se loger décemment

près d’un office du tourisme ?

 

Le Pays basque n’est pas…

 

medium_le_pays_basque_n_est_pas_a_vendre_petit_.jpgLe jeudi 11 août dernier, un quidam ano- nyme aurait découvert, dans une pou- belle toute proche de l’office de tourisme de Bayonne, une bombe artisanale toute aussi anonyme mais, selon les sources officielles, bien peu explosive. Bon. L’évé- nement n’a rien de si extraordinaire que ça, même si… et même si… Des engins explosifs ou réputés tels faisant long feu, ce n’est pas chose rare en Pays basque nord, surtout ces dernières années. Il ar- rive même parfois, mais là beaucoup plus rarement, que ceux- ci fonctionnent et occasionnent des dégâts matériels. Ces der- niers temps, manifestement en lien avec une crise du logement sans précédent décuplée par un niveau de spéculation immo- bilière encore jamais atteint, plusieurs agences immobilières ainsi que des complexes hôteliers ou résidentiels ont été ciblés par les poseurs de bombes. Parfois avec succès. Mais encore jamais, tout du moins depuis (faudra que je vérifie) des lustres et des lustres, un office de tourisme n’avait été visé. Faudra que je vérifie aussi l’existence de poubelles publiques aux abords du bâtiment bayonnais visé par cet attentat car, il me semblait bien que, depuis fort longtemps déjà, il est devenu impossible de se débarrasser civiquement d’un papier dans la rue. Bref, pendant les quelques jours qui ont suivi cet évé- nement, le landernau médiatique côte basquais aura pas mal spéculé sur l’identité présumée de ses auteurs et, avec le recul que m’autorise le rythme aléatoire de mes écrits sur ce si joli blog tout bleu, quoique très moyennement influencé par cet air du temps-là, durant cette courte période où l’actualité est encore actuelle, j’ai également eu envie de savoir qui et quoi, et surtout à quelle stratégie politique il faut attribuer ce dépôt d’encombrant sur lequel enquête la cellule anti-terroriste du parquet de Paris, poil au quiqui.

Je ne vais pas citer l’organisation qui aurait téléphoniquement revendiqué (revendication que je crois tout à fait crédible, mais là n’est pas mon propos…) cette action en alertant les pompiers, mais juste souligner que le porte-parole de la ligue dissoute en question aurait conclu son avertissement par un impératif «le Pays basque n’est pas à vendre». Bon. Outre que ce slogan manque quelque peu de modernité à mon sens, à première vue, je trouve que la ligne stratégique d’une condamnation franche et déterminée de la spéculation immobilière perd en lisibilité ce qu’elle gagne en confusion en prenant pour cible un objectif matériel spécifiquement orienté sur la promotion touristique en général. En clair, un office de tourisme ne fait pas le même boulot qu’une agence immobilière. Et tous les boums n’ont pas le même sens. Bon. Ceci dit, il est vrai que quand on s’oppose à la marchandisation du Pays basque (ne suis-je pas moderne ?), cela ne concerne pas seulement le foncier ou l’immobilier, le label «Euskal Herria» recouvre tout, tout et même le reste, depuis le fromage de brebis à la confiture de cerises noires jusqu’aux «innovations» en provenance de la technopole Izarbel, en passant par les danses du groupe Luixa à Béhobie ou carrément les fêtes de Bayonne… À ce propos, et tant qu’à spéculer sur le sexe des poubelles piégées, il me semble qu’une telle stratégie symboliste aurait été renforcée dans son efficacité par une «explosion promotionnelle» AVANT les fêtes de Bayonne, juste quelques jours avant, disons une semaine, dans l’idéal. Mais je me fourvoie très certainement quant aux véritables motivations du ou de la ou des poseurs de bombe. À cause d’une toute petite difficulté de lisibilité je me mets à tout mélanger, à mettre tout sur le même plan, dans le même sac, le tourisme vert à la ferme et les golfs dix-huit trous avec vue imprenable sur les Pyrénées, les fonctionnaires impuissants de l’office HLM et les 95 kollabos d’Orpi, les gentils de Kukuxumusu et les mercantiles de 64, les corridas en août et le surf en février, le Musée basque de Bayonne et le Mac Drive de St Jean de Luz, le prix d’une bouteille d’Irouléguy et celui d’une cartouche de cigarettes à Dantxaria… les limites sont parfois bien confuses mais il faut toutefois bien comprendre que refuser de vendre son pays ne signifie nullement s’opposer à la marchandisation de son image identitaire. D’ailleurs, hein, cette frontière au milieu du Pays basque, nous les Basques, nous n’en voulons pas. Parfois je me trouve un peu cynique… et confus autant.

 

Ceux qui achètent et vendent le Pays basque

 

Toujours à propos de tourisme, de Pays basque à vendre ou à marchandiser, de 11 août et d’engin explosif, et afin d’illustrer ma conclusion provisoire sur le sujet, je prendrai nettement moins de précautions rhétoriques pour citer un «collègue» bloggeur bayonnais (le label «Euskal Herria» c’est aussi son satellite internétesque gros d’une toute petite dizaine de blogs répertoriés dans l’arrondissement de Bayonne), le seul à s’être permis un commentaire «à chaud», un certain Aitor je crois. Lui aussi c’est «le Pays basque n’est pas à vendre» qui l’aura fait réagir. Là s’affiche notre unique pixel de complicité, car moi, plébéien de condition et bleu de couleur, je ne me suis pas contenté de vouloir réagir, j’ai attendu, j’ai réfléchu et je n’ai écru qu’après avoir essayé de comprendre. Et maintenant je dois avouer que je n’ai pas tout compris. Bien sûr, quand Aitor répond au slogan de Pindar (signature utilisée par les premiers patriotes basques du nord à l’avoir popularisé, dans les années 70, à ma connaissance) par un tout aussi ridicule que méprisant «je croyais qu’il était déjà propriété française», il m’énerve gra- ve et c’est très exactement à la suite de cet énervage virtuel que j’ai finalement compris ce qui me semble devoir être l’es- sentiel de la motivation d’un aspirant saboteur d’office de tou- risme en Pays basque. Quand le bloggeur anonyme (pas moi, l’autre, bien évidemment) prétend tourner en ridicule le slogan patriotique au prétexte que tout le Pays basque serait déjà vendu à la France (et qui donc l’aurait vendu, qui, des noms ?), c’est avant tout et tout simplement pour nier l’existence d’une patrie des Basques. Voilà. Le Pays basque existe-t-il, a-t-il ja- mais existé, existera-t-il un beau jour ou un grand soir ? Là est la question, la vraie question, la seule question serais-je tenté d’exagérer en paraphrasant Shakespeare. Excusez du peu. Au passé comme au présent et au futur, ma réponse est sans am- biguïté OUI. Oui le Pays basque existe et non Aitor, tu n’es pas marrant, je ne dirai pas ce que je pense de ton acuité intellec- tuelle… poils aux aisselles. Bref, une question en entraînant une autre, j’y ai finalement pas mal réfléchi et, afin de m’adapter aux limites imposées par le format de mon si joli blog tout bleu, j’ai choisi de formuler personnellement ma réponse par la pluralité optionnelle d’un QCM.

 

Le Pays basque n’est pas…

(cliquez sur votre réponse)

1° ) à vendre.

2° ) à louer.

3° ) français.

4° ) ni espagnol.

5° ) béarnais.

6° ) bleu.

 

Le plébéien bleu butane

Misère et malheur préfèrent le noir

 

La colère aussi

 

Des dizaines de morts à Paris dans les incendies d’immeubles insalubres ou pour le moins vétustes, cette nuit du 29 au 30 août, et juste avant l’été aussi. Des centaines voire des milliers de victimes en Louisiane et à la Nouvelle Orléans, la nature se venge en inventant des catastrophes que seuls les hommes sa- vent fomenter. Des dizaines, des centaines de milliers de géno- cidés de la guerre économique sur tout un continent, la terre d’Afrique est noire. Noire, la même couleur que toutes ces victimes dont les corps se mettent à pourrir spontanément dans nos consciences, ces victimes d’une même et unique guerre mondialisée. Dans l’échelle dégringolante de victimisation, nos sociétés « occidentales » ont plus que jamais peur du noir. Être noir c’est toujours pire que tout. Le pire des malheurs, ici et maintenant plus qu’hier et dans l’œil du voisin, être noir signifie malheur, misère et mort. Les trois «M» de la haine. Et maintenant, comme toujours, dans nos boites à images toutes faites, dans nos boites à voix de son maître, dans nos boites à plus d’idées ronronne l’hypocrite compassion, cette compassion médiatique à grand spectacle formatée pour échanger des bons sentiments contre un aveu général d’impuissance. La machine continue à tourner, folle cette roue de l’infortune qui cherche et trouve ses coupables parmi les victimes.

L’«Innommable» est au premier rang, comme toujours, tous les spots sont pour lui, tous les micros lui sont tendus et il continue à distiller sa haine du noir : il faut raser les squatts, chartériser les mal-logés ou les délogés ; pour supprimer la misère et le malheur, chassons-les bien loin de chez nous, broyons les noirs, tous les noirs, les femmes et les enfants d’abord, et le bonheur, la confiance reviendront. La campagne électorale bât le beurre de l’argent et de toutes les peurs du noir, l’«In- nommable» se rendra sûrement au chevet de son mentor Jacot le Rictus, président de toutes les bananes par intérim, pour distraire sa cour flagorneuse, devant les caméras éblouies de tant d’humanité il mime un combat de boxe charentaise avec son ami de cent jours… et me reviennent en mémoire déjà ces mots de haine ordinaire, minables :

 

 

Déjà les boites se sont remises à jacasser. Les coupables, il faut des coupables, pas responsables mais coupables, les jeu- nes des banlieues sont les coupables. Le pire, le plus effrayant que nature, c’est qu’il s’agirait de filles, de jeunes filles, d’une simple dispute entre jeunes filles qui aboutit au nouveau drame. Mais ce n’est pas le même immeuble, on est plus à Paris là, ni au Val de Grace, on mélange les catastrophes dans le grand chaudron de l’information et le citoyen spectateur du premier étage fulmine contre les noirs, peu importe. On n’a pas précisé la couleur des jeunes filles, pour une fois, par pudeur (sont elles voilées ?), ou pour laisser un peu tourner sur son élan la roue folle de l’imaginaire populaire… ou alors parce qu’on n’a pas d’images à vomir on rajoute, sibyllin, qu’être français peut avoir des origines plurielles, et bleu, et blanc, et beurre, mais pas noires, ou alors loin, très loin, très exotique, très «y’a bon banania», et rassurez-vous, bonnes et moins bonnes gens, les coupables sont identifiés, l’«Innommable» saura bien les punir, nous en débarrasser.

Toutes les nuits les enfants ont peur

Je hais l’«Innommable». De plus en plus fort. Parce qu’il me fait de plus en plus peur. Il y a quelques semaines, par défi et par goût du «bon mot» j’avais affirmé, en tout petit comité, devant des amis, que mon destin, ou plutôt celui du plébéien bleu était de l’assassiner. Normalement, je ne suis pas quelqu’un qui croit à la destiné, mais j’aime le noir, la couleur noire, j’aime à dire que ma colère est noire et donc belle. Malheureusement je ne sais pas assassiner, faudrait peut-être que j’apprenne…

 

Le plébéien noir de colère